Professeur stagiaire à 18h !

Le Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré (CAPES) est un concours qui, obtenu, permet d’enseigner en collège et en lycée.

Jusqu’à l’année dernière, l’année suivant l’obtention du CAPES était suivie d’une année pendant laquelle le futur professeur (dit « professeur stagiaire ») était en responsabilité dans une classe (environ six heures) et suivait par ailleurs une formation dans un Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM). Ce n’était d’ailleurs qu’à la fin de cette formation, après évaluation, que le CAPES était définitivement accordé. Une petite année de formation, avec ensuite la possibilité de suivre des stages pendant sa carrière, cela constituait un viatique minimum pour une personne chargée d’assurer la formation de nos élèves pendant une quarantaine d’années.

Mais c’est fini. Dès la rentrée les professeurs stagiaires devront assurer un service complet (dix huit heures) devant les élèves. Comme formation, ils bénéficieront, selon les académies, de deux jours de formation avant la rentrée pour assurer un bagage minimal : connaissance des programmes et référentiel de la discipline, construction de cours, premiers contacts avec une classe, gestion de classe, etc. Oui, deux jours pour tout ça. Ensuite ils seront libérés de leurs classes quelques journées dans l’année (trois jours avant la Toussaint, deux jours en janvier, etc.). Chaque professeur stagiaire aura un professeur tuteur dans l’établissement qui lui assurera l’essentiel de sa formation. Ce tuteur devra assister de septembre à la Toussaint à 3h des cours du stagiaire par semaine. Entre février et mars, ce tuteur s’absentera de ses classes deux semaines pendant lesquelles le tuteur travaillera avec le stagiaire.

Cette régression est une catastrophe pour la formation initiale des professeurs stagiaires, et donc pour les futurs élèves qu’ils auront en charge.

Cette régression est une catastrophe pour les élèves dès la rentrée. En effet, avec les saignées de postes qui affectent l’éducation nationale, il sera impossible de trouver des professeurs titulaires remplaçants pour assurer les cours des professeurs stagiaires et des professeurs tuteurs. Ce seront donc des vacataires ou des étudiants en maîtrise, tous sans formation, si jamais on trouve des volontaires, qui seront devant les classes.

Cette régression est la mise à mort des IUFM, qui ont toujours été détestés par le courant aujourd’hui au pouvoir, ainsi que par une partie non négligeable des professeurs (il n’y a qu’à écouter les blagues sur la formation IUFM et son fameux référentiel bondissant, ou la détestation dont certains font montre à l’endroit de toute théorie pédagogique ou didactique), jugeant, les uns comme les autres, que l’enseignement s’apprenait très bien sur le tas et qu’il suffisait d’avoir été élève suffisamment longtemps pour devenir professeur.

Et ceci permet d’économiser sur le long terme l’équivalent d’une année de postes, les retraités étant remplacés par des professeurs stagiaires – c’est le cas d’un collègue, enseignant en mathématiques, de mon lycée dont le poste sera transformé en poste de stagiaire. Pour manifester notre hostilité à cette réforme, nous avons collectivement décidé qu’aucun d’entre nous n’assumera le rôle de tuteur de ce futur stagiaire ; en espérant que les politiques reviendront sur cette réforme et que le futur stagiaire n’aura pas à en souffrir.

Car, oui, cela augure beaucoup de souffrances pour les futurs nouveaux professeurs et peut-être aussi pour les élèves.

Le prix en valait-il la chandelle ?

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Commentaires

Effectivement, c’est aux anciens professeurs de refuser le rôle de tuteur, car les stagiaires n’ont aucun pouvoir face à une année ou ils sont justement testé.
Et les nouveaux stagiaires le savent bien que c’est le rôle des professeurs actuels que de refuser ce statut de tuteur pour stopper cette réforme…l’entente risque d’être d’autant plus difficile entre un tuteur et son stagiaire si celui-ci sait pertinemment que son tuteur jour le rôle de mouton face à un gouvernement qui les méprise…si personne n’agit, c’est sur, on peut prévoir des jours sombres pour les nouveaux arrivants !!!!!

Je suis professeur stagiaire à la rentrée, et c’est déjà suffisamment difficile de savoir que l’on va être lâché dans les classes sans formation à plein temps, alors si en plus les tuteurs nous laisse tomber…
Si je comprends bien non seulement nous sommes pris en otage par le gouvernement mais aussi par nos futurs collègues… Rappelez-vous de vos débuts et aidez-nous à nous intégrer correctement (nous sommes les premiers à subir cette réforme injuste), au moins pour le biens des élèves.

Cette année est cruciale car c’est la première année que cette régression est mise en place. Et c’est peut-être l’unique fois où l’on pourra faire changer cela (avec la prochaine présidentielle, mais là c’est assez hasardeux).

Alors c’est sûr que cela va être dur pour ceux qui subissent ça, mais je ne vois pas comment agir autrement…

Je suis complètement d’accord avec Pierre et David, et beaucoup moins avec coleu. Je serais également professeur stagiaire à la rentrée, et je pense que le rôle des tuteurs est de refuser le poste qui leur est attribué par le gouvernement. Accepter ce poste, ca serait tout simplement accepter la réforme. Or, nous savons pertinemment que cette réforme est catastrophique, alors tant pis si nous devons payer les pots cassés pour cette année mais nous ne pouvons accepter cela.
A nous aussi professeurs stagiaires de se syndiquer et de suivre les mouvements de grève.
Ca risque d’être une année difficile mais il faut se serrer les coudes, anciens comme nouveaux, sinon la réforme passera comme toujours…les politiques ne sont pas sur le terrain, ils ne parlent que de théorie mais n’ont jamais passé une seule heure dans une classe, alors arrêtons de rester sans rien faire.

Bonjour à toutes et à tous!

Dans le cadre d’un prochain reportage pour M6, nous aimerions réaliser le portrait d’un professeur stagiaire qui va donc faire sa première rentrée scolaire et qui se retrouvera à la rentrée devant une classe pour la première fois.

Si vous êtes intéressé(e) pour participer à ce projet, n’hésitez pas à me contacter au 01 44 75 11 08 ou par mail à l’adresse suivante: christellegambon@gmail.com

D’avance merci et à bientôt!

Christelle

Bonjour,

je serai tuteur pour la rentrée 2010. J’ai milité, pétitionné, défilé et, donc, perdu des 1/30 de salaire contre cette réforme qui malgré la mobilisation est passée. Ce n’est pas une fois que la loi est passée qu’il faut se réveillé… comme le disait ma sainte mère: « ce n’est pas une fois qu’on a fait dans son froc qu’il faut serrer les fesses » :) Maintenant il faut bien accuellir ces stagiaires… @ bientôt

Si on ajoute qu’il est également exigé du professeur stagiaire cette même année de valider un certificat de compétences en langues de l’enseignement supérieur et un certificat de compétences en informatique et interne sous peine de ne pas pouvoir être titularisé (autrement dit, un agrégé en mathématiques excellent pédagogue qui n’aurait pas un niveau suffisant en anglais pourrait – si on suit les textes du BO – se voir refuser sa titularisation), je demande : qui osera encore devenir professeur ? Je ne parle même pas de ceux qui n’ont pas encore fini de valider leur M2… Alors oui, ces nouvelles exigences mises en place aussi brutalement sont, il me semble, inacceptables et appellent à se serrer les coudes entre professeurs stagiaires et tuteurs ! (je parle en connaissance de cause : je viens de réussir mon CAPES de philo)

P.S. : j’ai même entendu de la part d’un responsable du standart servant à aider les profs stagiaires qu’il n’est pas impossible que les formations soient effectuées pendant les vacances (il faudra donc assumer la charge de cours d’un prof titulaire – alors qu’on doit, soit dit en passant, rédiger pour la première fois des cours pour des classes dont on apprend 4 jours avant quelles elles seront – + une formation du métier + valider des certificats sous menaces de se voir refuser sa titularisation…). A-t-on conscience de ce qui exigé aux nouveaux enseignants ?

J’étais moi même cette année stagiaire en situation alors que j’ai eu le CAPES. En effet avant la réforme, toute personne qui avait plus d’un an effectif d’ancienneté se voyait basculé stagiaire en situation.
Il y avait donc le temps complet, plus 20 séances dans l’année à l’IUFM à choisir parmi ce que l’on trouvait le plus intéressant pour nous les « expérimentés » et effectivement ce fameux c2i2e à valider. Rajouter à ça un service partagé sur 2 établissements éloignés de 35 min en voiture et des responsabilités au sein d’un établissement vous voyez l’année douce et heureuse !
C’est donc avec grande peine que je vais voir rentrer cette année des collègues en stage qui n’ont jamais enseigné dans cette douce folie. J’espère pour eux qu’ils auront des tuteurs très à l’écoute et surtout plein de bons conseils pratiques.

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