Première ES : ce qui change dans les programmes de mathématiques
Comme je l’indiquais précédemment, le ministère de l’éducation nationale a lancé la consultation sur les nouveaux programmes dans les différentes filières. Cette consultation est basée sur des projets de programme qui pourront être modifiés selon les retours des enseignants et donneront ensuite les programmes définitifs.
Si l’on se réfère à ces projets de programme, voici un résumé des changements en Première ES.
Algèbre et analyse
Les généralités sur les fonctions et les fonctions associées disparaissent. Le travail sur les fonctions est plus poussé en Seconde et l’outil fonction associée étant d’un intérêt assez négligeable, ce n’est pas un mal.
Le second degré, maintenant entamé en Seconde (variations d’une fonction trinôme, symétrie de sa courbe), est poursuivi en Première (racines, signes).
C’est en Première qu’on introduit les quelques dernières fonctions de référence (inverse, racine, cube) puis on enchaîne sur la dérivation qui demeure inchangée (nombre dérivé, fonction dérivée, applications : variations et extremums).
Le comportement asymptotique (limites) est repoussé en Terminale. Ce point est discutable. Découvrir les limites sur une seule année, celle du baccalauréat, risque de perturber les élèves les plus en difficulté qui ont bien besoin de deux ans pour digérer la notion, quand ils y arrivent. Par contre tout faire en Première, ou presque, comme c’est le cas aujourd’hui est aussi difficile. Je suis donc partagé. Une solution aurait peut-être été de ne pas voir la notion de limite avant le baccalauréat…
Les suites sont toujours présentes sans aucun changement.
Bizarrement les pourcentages sont inclus dans la partie algèbre et analyse. Aucune modification n’est apportée à son contenu. J’aurais cru pourtant, en voyant ce que fait mon fils en Troisième sur le sujet, puisqu’il en est déjà aux taux d’évolution (soit en gros le cœur des pourcentages de Première ES) mais peut-être que son enseignant fait du zèle (tant mieux).
Enfin les résolutions de système disparaissent complètement (de Première comme de Seconde).
Statistiques et probabilités
Les quartiles étant désormais introduit en Seconde, la partie statistique de Première en est allégée d’autant et les histogrammes à pas non constants disparaissent. Sinon rien n’est changé (écart-type, boite à moustaches, etc.).
En probabilité, par contre, c’est l’embouteillage. Les précédents programmes ne faisaient qu’introduire la notion de probabilité en Première, ce qui est fait dorénavant en Seconde, voire en Troisième. Du coup tout le programme de Terminale ES sur les probabilités passe en Première et même plus : variables aléatoires (qui n’étaient pas au programme de la filière ES), Bernoulli (anciennement en Terminale), coefficients binomiaux (pas au programme). Ajouté à cela l’échantillonnage. Tout le programme de Terminale, donc, sauf… les probabilités conditionnelles, qui restent en Terminale. Ce choix est étrange. On a besoin des probabilités conditionnelles pour démontrer rigoureusement les propriétés s’appliquant dans les arbres pondérés, indispensables en probabilité. L’outil arbre pondéré sera donc un outil un peu magique quand on le mettra en oeuvre pour Bernoulli, et rendu plus rigoureux l’année d’après. Pourquoi ne pas avoir descendu les probabilités conditionnelles en Première, avec éventuellement l’espérance, et ne pas avoir laissé Bernoulli et le reste en Terminale ?
Algorithmique et logique
Ces deux points ne font pas l’objet d’un chapitre particulier mais des indications sont données un peu partout où il faudra utiliser de l’algorithmique.
Spécialité
Le dernier changement est le plus important ; il n’est pas lié au programme, mais à la réforme du Lycée : il n’y aura plus d’enseignements de spécialité en Première ES et donc pas d’enseignement de spécialité mathématique (seulement en Terminale et pour 1h30 au lieu de 2h actuellement). Ce changement ne sera pas sans conséquences quant au recrutement en Première ES ; le plus probable est que les élèves très doués avec une appétence pour les sciences sociales qui hésitaient entre s’assurer un avenir scolaire en allant en S ou suivre leurs envies en allant en ES, ces élèves là n’hésiteront plus : ils iront en S, meilleure garantie pour une bonne formation pour ceux qui souhaitent intégrer une filière sélective (prépa,…). On prépare donc à la filière ES le même destin qu’à la filière L. Celle-ci s’est vidée en quantité et en qualité à partir du moment où on a supprimé les mathématiques et, même si on a tenté de réparer cette erreur ensuite en y introduisant une spécialité mathématique, rien n’y a fait : la filière ne s’est jamais plus remplie. À ne tirer aucune leçon des erreurs du passé, on prépare un avenir où nos dirigeants se demanderont comment faire pour attirer de nouveaux des (bons) élèves en ES ; il sera bien évidemment trop tard.
Conclusion
La disparition de la spécialité mathématique en Première sera lourde de conséquences, d’abord pour l’image de la filière. Ensuite nul ne sait ce que deviendra le contenu de la spécialité en mathématiques. Sans les matrices vues en Première, difficile de faire les graphes en Terminale or, si cet objet mathématique n’est peut-être pas essentiel (du fait de sa place dans l’univers des mathématiques) dans un parcours pre-bac, il n’en reste pas moins un objet didactique très intéressant puisqu’il permet de baser son enseignement uniquement sur la résolution de problèmes (intéressants et ludiques) et de mettre en oeuvre beaucoup d’algorithmes différents, or l’algorithmique est, elle, la grande nouveauté pour tous les cursus. Allez comprendre.
Le programme d’obligatoire, lui, est assez bien pensé surtout pour l’analyse. Avant la marche à franchir entre Seconde et Première était assez grande. La notion de fonction, centrale au Lycée, était mal sédimentée dans les programmes actuels avec finalement assez peu de choses en Seconde et énormément en Première (fonctions associées, trinôme, dérivée, limites !), que ce soit en ES ou en S d’ailleurs. Là le lissage entre les années est meilleur : on va plus loin en Seconde, on ne garde quasiment que la dérivée en Première et les limites sont repoussées en Terminale. C’est aussi bien. Par contre cela risque d’être l’embouteillage en Terminale avec les limites, les fonctions composées, le calcul intégral, le logarithme, l’exponentielle. Gloups. Il me semble que le logarithme aurait pu être passé en Première (quoique sans calcul intégral, c’est difficile) car il est utile pour les pourcentages et les suites géométriques. Pour ce qui est des statistiques et des probabilités, le lissage est, je crois, un peu moins bon. S’il n’y a rien à dire pour les statistiques, pour les probabilités le choix des chapitres traités en Première et Terminale ne me semble pas très cohérent, les probabilités conditionnelles restant en Terminale quand Bernoulli et les variables aléatoires passent en Première.
À suivre donc.

Si vous avez apprécié cet article, s'il vous plait, prenez le temps de laisser un commentaire ou de souscrire au flux afin de recevoir les futurs articles directement dans votre lecteur de flux.
Commentaires
Pas encore de commentaire.
Désolé, les commentaires sont clos pour le moment.